Bien que le siège social de son entreprise soit implanté au cœur du centre-ville de Montréal, c’est dans l’île Jésus que l’homme d’affaires immigré des pays de l’Est a choisi de bâtir son empire. Quinze ans avant la grande fusion de 1965, M. Kotler y a posé la première pierre en acquérant un bloc de 250 hectares qu’il destinait au développement résidentiel de la future Ville de Laval.
Holding
Aujourd’hui âgé de 83 ans, Alex Kotler est président du conseil d’un puissant holding dont les multiples filiales s’infiltrent dans toutes les dimensions du secteur immobilier au Canada comme aux États-Unis. Son fils Barry assure la relève en qualité de président et directeur général de cette prospère entreprise qui gère et détient à la fois des édifices à bureaux, des parcs industriels, des centres commerciaux, des complexes hôteliers et des projets résidentiels.
Considéré parmi les plus grands propriétaires fonciers privés au Québec, Monit International est profondément enraciné en terre lavalloise. On en donne pour preuve les 1 800 hectares (200 millions de pieds carrés) de terrain à développer dont l’empire dispose à l’heure actuelle, dont la moitié logerait dans la partie est de l’île Jésus.
Pour donner une idée de la valeur foncière, quelque 125 lots cadastrés à Laval ont fait l’objet d’une garantie hypothécaire pour un refinancement de 50 M$ que contractait Alex Kotler, en janvier 2006, auprès de la Banque Leumi Le-Israel de l’État de New York.
Spéculation et dézonage
Le moins qu’on puisse dire est que le redécoupage de la carte agricole lavalloise vers la fin des années 80 a eu un effet stimulant sur les affaires de M. Kotler.
Selon les coupures de presse, ce dernier aurait eu la main heureuse en se portant acquéreur de quelque 330 hectares «zonés verts» dans les deux années précédant l’entente historique de mars 1988 qui amputait du tiers la zone agricole de Laval. Ainsi, au lendemain de l’accord intervenu entre la MRC de Laval et l’Union locale des producteurs agricoles (UPA), ces terres acquises pour une bouchée de pain valaient soudainement une petite fortune.
Des 4000 propriétaires terriens qui avaient bénéficié de ce grand dézonage de 4444 hectares, Alex Kotler fut sans conteste le grand gagnant. Monit International et ses différentes sociétés disposaient à l’époque d’environ 900 hectares, soit un cinquième de la vaste superficie dézonée dans la tourmente par le gouvernement Bourassa.
Proche des libéraux
Il aura toutefois fallu attendre 2 ans et 3 mois suivant la signature du protocole d’entente entre la MRC et l’UPA avant que le décret gouvernemental ne scelle finalement l’accord de dézonage en juin 1990.
Transporté à l’Assemblée nationale en 1989, le débat soulève les passions entre péquistes et libéraux : spéculation foncière, transactions, tractations, allégations de copinage, trafic d’influence, conflit d’intérêts, décision renversée, démission, moratoire et demande d’enquête publique; les médias ont fait de l’accord leurs choux gras.
Parmi ceux qui attirent l’attention des parlementaires et des médias dans cette saga, l’ex-trésorier du PLQ Tommy D’Errico et le promoteur Alex Kotler. Proche des libéraux, M. Kotler et les membres de sa famille contribuent généreusement à la caisse électorale du Parti libéral du Québec dans les années 80.
Entre 1985 (année de l’élection de Robert Bourassa) et 1990, la famille Kotler versera pas moins de 23 000 $ dans les coffres du PLQ. Une somme considérable étant donné que la loi sur le financement des partis politiques limite à 3 000 $ par année la contribution permise par électeur.
Pont dans l’Est
Près de vingt ans plus tard, l’actif de Monit est aujourd’hui promis à une seconde irrésistible poussée. Au même titre que la valeur de ses propriétés foncières a décuplé à la suite du controversé dézonage, le parachèvement de l’autoroute 25 décrété par le gouvernement libéral de Jean Charest en 2005 suscitera une véritable flambée immobilière dans ce secteur de Laval où Kotler règne en maître.
Au chapitre du développement domiciliaire, on estime d’ailleurs entre 6000 et 8000 les nouvelles unités d’habitation qui écloront dans l’Est, plus précisément au sud de la voie ferrée du Canadien Pacifique.
Val-des-Ruisseaux
Incidemment, Les Investissements Monit inc., une filiale de l’empire, est présentement en démarchage auprès des autorités municipales afin de préparer le terrain à un vaste développement résidentiel connu sous le vocable «Val-des-Ruisseaux». Au sujet de ce projet embryonnaire, l’administration municipale est d’une discrétion absolue, alors que le promoteur n’a pas daigné retourner notre appel.
Tout ce qu’on en sait, pour l’instant, est contenu dans un document public en lien avec une demande de changement de zonage favorisant la densification de l’habitat.
Adressée par André Dubord, directeur du développement pour Les Investissements Monit inc., cette requête a reçu l’aval du comité exécutif. Elle a toutefois été contestée, le 1er février, par les citoyens voisinant avec le futur projet, contraignant les élus municipaux à reporter le tout.
Le Courrier Laval évalue à plus de 10 millions de pieds carrés le projet domiciliaire sur la table à dessin. La dénomination «Val-des-Ruisseaux» est fortement inspirée de «Val-des-Brises», un quartier cossu un peu plus à l’ouest que Monit mettait en chantier au début des années 1990 et qui devrait, à terme, totaliser près de 3000 résidences. .